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Réguler les plateformes numériques

L’essor des technologies numériques a fait naître de nombreuses plateformes numériques, devenues incontournables dans le quotidien des Français et des entreprises. Leur développement rapide requiert une régulation du marché, de l’offre de services en ligne et des usages qui en sont faits.

Publié le : 11 sep 2024
© Wachiwit - Getty images

La Direction générale des Entreprises (DGE) participe activement à la conception et à la définition du cadre de régulation des plateformes numériques aux niveaux européen et national. Grâce à un travail d’analyse des pratiques de grandes plateformes numériques, réalisées notamment par le Pôle d’expertise de la régulation numérique (PeReN), elle propose des pistes de régulation pour favoriser la concurrence et l’équité sur les marchés numériques (publicité en ligne, cloud, etc.) et pour assurer la protection des usagers. La DGE a notamment porté les négociations sur les deux règlements européens Digital Services Act (DSA) et Digital Markets Act (DMA) et travaille désormais activement à leur mise en œuvre au niveau national. Elle a par ailleurs conçu et piloté les travaux relatifs à la loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (SREN), promulguée en mai 2024.

En quoi consiste le « Digital Services Act » ?

Le Digital Services Act (DSA) a pour objectif de lutter contre la dissémination en ligne de contenus dangereux, illicites ou préjudiciables et de protéger les utilisateurs tout en préservant un équilibre propice à l'innovation dans l’économie numérique. Entré en application en février 2024, le DSA responsabilise l’ensemble des plateformes numériques et prévoit des obligations graduées selon leur taille. Il prévoit également un renforcement des obligations spécifiques aux places de marché en ligne pour assurer la protection des acheteurs.

Qui est concerné par le DSA ?

Le DSA s'applique à l’ensemble des intermédiaires en ligne (incluant hébergeurs, moteurs de recherche, plateformes de partage de vidéos, réseaux sociaux ou encore places de marché en ligne) qui fournissent des services au sein de l'Union européenne.

DSA : quelles sont les obligations pour les plateformes numériques ?

  • Informer les usagers sur leurs politiques de modération des contenus, leurs systèmes de recommandation et la publicité qu’elles diffusent ;
  • Garantir les droits des utilisateurs par des mécanismes de signalement et de traitement interne des réclamations ;
  • Prendre des mesures renforcées de protection des mineurs en ligne ;
  • Informer les autorités judiciaires lorsqu’elles soupçonnent une infraction pénale grave ;
  • Identifier les vendeurs qui mettent en vente leurs produits ou services sur leurs interfaces ;
  • Traiter de façon prioritaire les signalements opérés par des tiers de confiance reconnus (associations de protection de l’enfance, associations de défense des libertés civiques, etc.) ;
  • Produire régulièrement des rapports de transparence sur leurs pratiques de modération.

  • Rester inactives suite au signalement par un usager de la diffusion d’un contenu suspecté d’illégalité ;
  • Utiliser des interfaces qui visent à manipuler ou tromper l’utilisateur dans ses choix ;
  • Suspendre le compte d’un utilisateur sans lui fournir de motifs valables ;
  • Utiliser les données personnelles de mineurs pour leur adresser des publicités ciblées sur leurs préférences ;
  • Afficher de la publicité ciblée sur la base des données sensibles (sexe, opinions politiques, orientation sexuelle, etc.) détenues sur les utilisateurs.

Les très grandes plateformes (plus de 45 millions d’utilisateurs) ont des exigences renforcées, notamment de prévenir les grands risques systémiques induits par leurs services (risques pour les mineurs, pour la santé, risques des contenus de désinformation, pratiques frauduleuses, etc.).

Si une plateforme enfreint les règles fixées, elle s’expose à une amende pouvant atteindre jusqu’à 6 % de son chiffre d’affaires annuel total. Dans les cas les plus graves, cette amende peut être complétée par une mesure temporaire de restriction de l’accès au service.

Qu’est-ce que le « Digital Markets Act » ?

Entré en application en mars 2024, le Digital Markets Act (DMA) a pour ambition de rétablir l’équité et la contestabilité dans les marchés de services de plateforme numérique. Ce règlement fixe un cadre équitable pour les relations commerciales entre les entreprises opérant sur le marché européen et les grandes plateformes « contrôleurs d’accès » ou gatekeepers, lesquelles sont soumises à des obligations et interdictions. Le DMA encadre leurs pratiques en ligne et limite les risques d’abus de leur position de marché au détriment de la concurrence, de l’innovation et des intérêts des entreprises partenaires.

Le DMA constitue une avancée significative pour l’ensemble des entreprises utilisatrices de ces services des géants du numérique, notamment les PME et TPE qui se retrouvent parfois en situation de dépendance.

Qui est concerné par le DMA ?

Les entreprises en position de « contrôleurs d’accès » ou gatekeepers sont directement concernés par le DMA. Ces géants du numérique servent de point d’accès majeur aux entreprises tierces pour atteindre leurs utilisateurs et jouissent d’une position solide et d’un poids important sur les marchés numériques.

Quelles sont les obligations pour les plateformes désignées « gatekeepers » ?

  • Permettre aux utilisateurs de désinstaller les applications qui sont préinstallées sur leurs smartphones et leur laisser le libre choix de leurs moteurs de recherche et navigateurs par défaut ;
  • Rendre les services de messagerie instantanée (comme WhatsApp) interopérables avec d’autres services de messagerie ;
  • Permettre aux développeurs d’applications d’accéder dans des conditions équitables aux fonctionnalités auxiliaires et matériels informatiques des smartphones ;
  • Permettre un accès à un certain nombre de données essentielles pour les entreprises qui utilisent les plateformes.

  • Classer leurs propres produits ou services de façon plus favorable que ceux des concurrents (dans une logique d’auto-préférence) ;
  • Combiner les données personnelles collectées sur les différents services du gatekeeper ou utiliser ces données à des fins publicitaires, sans le consentement des utilisateurs ;
  • Empêcher les entreprises utilisatrices de proposer leurs produits ou services sur d’autres canaux de distribution à des conditions différentes.

Si un « contrôleur d'accès » enfreint les règles, il risque une amende pouvant aller jusqu'à 10 % de son chiffre d'affaires mondial total et jusqu’à 20% en cas de récidive.

Le DSA et le DMA permettent de rendre concret le principe selon lequel que ce qui est illégal hors ligne l’est également en ligne et sont complétés par la loi « Sécuriser et réguler l’espace numérique ».

Grâce à l’engagement de la DGE pour conduire les discussions européennes sur le DSA et le DMA, ces règlements ont été adoptés en un temps record (mars et avril 2022), sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne. De la conduite des négociations du DSA et du DMA à l’élaboration du projet de loi d’adaptation et de ses textes d’application, les services de la DGE s’appliquent à garantir l’impact optimal des réformes engagées au bénéfice des entreprises et des citoyens.

La loi « Sécuriser et réguler l’espace numérique »

En 2023, la DGE a conçu et piloté le projet de loi visant à renforcer la sécurité de l'espace numérique (SREN). Adoptée en mai 2024, cette loi a pour double ambition d’adapter le cadre juridique national aux règlements sur la gouvernance des données (DGA), DSA et DMA ainsi que de porter des mesures complémentaires.

La loi SREN protège les entreprises françaises face aux géants du numériques en limitant certaines pratiques commerciales et techniques des acteurs dominants du cloud. Elle offre aussi une meilleure protection en ligne aux citoyens, notamment aux mineurs, en luttant contre les arnaques et le cyberharcèlement sur les réseaux sociaux. Elle oblige les sites pornographiques à prendre les mesures plus contraignantes pour empêcher l’accès des mineurs à leurs contenus. Cette loi permet enfin de prévenir la cybercriminalité, apporte de nouvelles protections contre la désinformation, les ingérences étrangères et encadre plus efficacement les hypertrucages en ligne (ou deepfakes).

Les travaux du PEReN

Créé à l’initiative de la DGE en 2020, le Pôle d’expertise de la régulation numérique (PEReN) est un service à compétence nationale placé sous l'autorité conjointe des ministres chargés de l'Économie, de la Culture et du Numérique. Il est de vocation interministérielle et au service des régulateurs indépendants : il accompagne les administrations publiques qui conçoivent, mettent en œuvre et évaluent la régulation des plateformes numériques. Déployant son expertise dans une logique de mutualisation des compétences et de souveraineté des solutions, il intervient selon trois modalités :

  • le partenariat, via des conventions avec les services de l’État ou les autorités indépendantes intervenant dans la régulation des plateformes numériques ;
  • l’expérimentation, pour construire de sa propre initiative des prototypes d’outils de régulation ;
  • le travail de recherche, visant à conduire seul ou en partenariat avec des structures de recherche des travaux de recherche publique.

Fournissant ainsi des outils, des études et du conseil entièrement sur ses ressources propres, le PEReN mobilise une équipe d’experts data scientists et développeurs de haut niveau aux compétences techniques rares en matière d’analyse de données, de code source, de traitements et d’audit algorithmiques utilisés par les plateformes numériques.

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